20 mètres de bitume
sur un trottoir où se succèdent deux pilastres entourant une allée de garage,
un muret court,
deux pilastres bordant l’entrée d’une allée d’ardoise,
un muret long.
Sur ces 20 mètres,
une plaque d’égout bave régulièrement son trop plein
et nécessite les soins des services de voiries
qui percent et rapiècent chaque fois ces 20 mètres de bitumes
à la façon du dentiste du bas de la rue.
20 mètres franchis en une poignée de secondes.
On y voit,
lorsque l’on tourne la tête,
une allée en pente donnant sur un garage souvent ouvert
où se gare une BMW vert d’eau aux calandres chromées,
voiture-bateau qui me donne des nausées
et dans laquelle je ne souhaite plus monter.
Derrière,
le bric à braque habituel de tout garage.
Plus loin,
un bout de jardin marqué d’un grand sapin et de sa cour
et au bout du chemin,
une marche donnant accès à une terrasse et à la porte d’entrée brun lasurée.
Cette maison est rassurante, connue et immuable.
De printemps en hivers, se succèdent les mêmes rituels :
la peinture blanche du muret,
la taille de la haie,
le trou dans le trottoir et sa réparation.
Au printemps,
les 20 mètres sont recouverts de pétales roses délicats de cerisiers en fleurs
qui parfois remplissent le trou,
et l’air prend des parfums doux.
L’hiver,
la neige sur le trottoir marque le pas des passants et laisse un carré noir
délimitant le trou.
Un été,
l’allée d’ardoise laisse place à du carrelage solide et fixe, certes,
mais tellement plus commun,
le jardinet s’emplit de gravier blanc,
le sapin perd ses compagnons,
la porte change de couleur.
Sur ces 20 mètres,
il n’y a plus de cerisiers pour y déposer leurs pétales.
Sur ces 20 mètres, mes pas ont perdu leur chaleureux réconfort.
Ma tête ne se tourne plus sur ce monde étranger
qu’elle refuse de voir changer.
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